AU COUVERT DU TEMPS (Texte crypto-politique)

Contrairement aux idées reçues, il se pourrait qu’il n’y ait pas de système politique idéal, mais seulement des systèmes politiques adaptés aux situations à chaque fois nouvelles. Chaque système politique sécrète sa propre mort, voire son opposé diamétral. C’est Héraclite qui a raison. Le ver est toujours dans la pomme qui nous condamne au Devenir, au Dialectique. Un combat initial, étymologiquement, une agonie oriente notre sort. Croire, en un système politique idéal revient à être platonicien, essentialiste. Au même titre que le temps peut être défini comme l’image mobile de l’éternité immobile, le monde tout entier n’évoque qu’à grand-peine un au-delà, une cité divine où règne un système poltique définitif. S’il est vrai qu’à peine nés, nous sommes assez vieux pour mourir, selon la loi bien connue de l’entropie, tout mode d’organisation étatique est originellement voué à sa détérioration, comme le reste. À ce titre, sans doute n’est-il pas raisonnable de se dire démocrate, autoritariste, totalitariste, monarchiste ou féodaliste (pourquoi pas) sub specie aeternitatis (de toute éternité, pour l’éternité), toute structure pointant originellement vers sa dissolution.

Pour le dire autrement, en empruntant à nouveau au lexique de la thermodynamique, toute personne encartée dans un même parti tout au long de sa vie fait à sa manière allégeance à l’homéostasie dont le propre est d’être en un sens du côté du Vivant. Elle s’obstine à rétablir l’ordre en perdition en direction du principe qui l’anime et qu’elle souhaite, semble-t-il, exclusif de ce contre quoi il s’insurge.

Alors, peut-être, doit-on reconnaître que l’engagement politique, tout comme les promesses que l’on peut (se) faire n’est que le fait d’un saint entêtement, l’une des formes visibles de la vie qu’un certain Marie François Xavier Bichat définissait ainsi : « La vie est l’ensemble des fonctions qui résistent à la mort ».

Mais non décidément, les opposés étant indissociables tant que nous seront de ce monde, seul le Devenir, cet Être, singulier d’être dynamique, voire homéentropique*, nous sussure à l’oreille de suivre stoïquement son cours… Sub specie temporis* et d’épouser attentivement ses formes, de les accompagner… En traînant à peine les pieds.

* À la fois désordre et résistance au désordre.

* Sous le couvert du temps.

© Thierry Aymès

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