RAPPORT N’EST PAS RELATION

(Extrait d’une conférence enregistrée)

Julien Green écrivait: « L’aboutissement logique de l’érotisme est l’assassinat ». J’adhère à cette formule. J’ai même entendu dire que certaines actrices pornos avaient été réellement assassinées à la fin d’un film…

La mise à distance dans le jeu amoureux comporte semble-t-il quelques dangers. Sur ce chemin, une prostituée qui se fait payer est intéressante en l’occurrence en ce qu’elle autorise son client à lui « faire l’amour » de façon strictement hygiénique et sans considération pour la personne qu’elle est (ce qui ne veut pas dire que tous ses clients seront dans ce « rapport »). Elle permet à celui qui lui « fait l’amour » de ne pas s’extraire de son fantasme. De n’avoir au sens strict qu’un « rapport » avec lui-même. De même, peut-être, un analyste permet-il à son « analysant » de l’utiliser (comme un simple instrument donc) pour plonger dans son inconscient et le dispense-t-il de quelque délicatesse et détour que ce soit. Se connaître soi-même pourrait très bien ne se faire que par delà Bien et Mal par le truchement d’un « rapport » technique à l’autre rémunéré. Rapport n’est pas relation. Le rapport n’est pas humain…

En effet, le lien qu’établit la somme d’argent que l’on donne à son analyste en quittant son cabinet est un « non-lien » en ce qu’il objective et met à distance la personne de l’analyste et qu’en tant qu’il est objectivé, nous autorise à l’envisager, non comme un être humain dont je serais responsable à chaque fois que je m’adresserais à lui, mais comme l’occasion d’un dialogue authentique avec moi-même…

Dans le cadre d’une cure « psychanalytique », l’analysant n’a que faire de l’analyste qui n’est censé intervenir que de façon « technique » dans son discours. Le dialogue, dans la cure, ne se passe pas entre un homme englué dans sa névrose et un autre qui s’en serait extrait (partiellement ou totalement), mais entre l’analysant et lui-même par la médiation d’un support, d’un écran blanc autorisant le transfert, et que symbolise l’analyste. À proprement parler, l’analyste n’est pas un « être humain »*, il est un « outil »…et on ne dialogue pas avec un outil…

© Thierry Aymès

* Je précise que je parle ici de psychanalyse et non de psychothérapie.

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